Mémoire en conflits
Angélique Buisson
Tout a commencé, et tout commence toujours, par des rencontres.
De ces rencontres est né le projet de transmission et de construction de la mémoire à partir des archives de l’association des anciens combattants gérée par M. Nicollin, et du récit de ses membres, et d’autres habitants du territoire. Cette construction de la mémoire passe par une actualisation des enjeux qui la sous-tendent et, de fait, par la construction d’archives avec des personnes d’une autre génération, des jeunes qui aujourd’hui sont les dépositaires inconscient de ces histoires.
Ce projet artistique est centré sur les dimensions politiques, sociales, psychologiques et esthétiques des guerres intervenues principalement sur les cinquante dernières années. Ce qui tend à constituer un espace public de la mémoire et de l’inconscient collectif. Ce projet propose d’identifier, d’étudier et de préserver des archives visuelles, sonores et littéraires avec des personnes liées aux conflits. Cela vise à une actualisation de l'oubli tel que le conçoit Walter Benjamin «pour rétablir des significations occultés ou oubliées, il s'agit […] de sauver un passé menacé, de faire entendre des voix étouffées de l'histoire sans lesquelles il ne saurait y avoir d'humanité réconciliée». En effet, les mémoires possibles du passé sont le composant potentiel d’une histoire à écrire. À travers ces figures oubliées, ces impasses, ces anachronismes, c’est aussi passer par l’action de témoigner, de rapporter ce qu’on a vu, entendu (photographies, textes, propos racontant des faits vécus). Mais aussi les ouï-dire, c’est à dire ce qu’on n’a ni vu, ni entendu soi-même et qu’on ne sait que par le rapport à une personne, par transmission orale. Images et récits serviront surtout pour expérimenter entre souvenirs, anecdotes, expérience personnelle, analyses et citations.
L’histoire de la guerre se déroule constamment à plusieurs niveaux : histoire des communautés, histoires des familles, histoire de l’entité et de ses mutations. La complexité en est donc très subtile, la simplification ou la généralisation impossibles. À travers des témoignages, des documents et leurs légendes complexes, s’immisce alors un savoir autre, un savoir qui ressemble plus aux potentialités d’une archive non-encore explorée qu’à celui déjà acquis par des historiens. C'est aussi une interrogation du processus de documentation lui-même et un regard porté sur la façon dont l’histoire est transmise, transformée et instrumentalisée. Le regroupement des documents n’est pas destiné à clarifier un espace géo-politique complexe. Ils servent plutôt à démontrer la pseudo-lisibilité de ce type de documents et à y insérer un autre type d’image, d’expérience et de parole. Critiquant la suprématie du document dans les récits et chroniques de l’actualité, c'est une articulation de mise en mémoire de l’histoire donnée comme une série d’énigmes ouvertes chargées de référence que les participants peuvent y projeter et interpréter.
C’est donner lieu à une archive, à une histoire.
Un projet d’Angélique Buisson avec l'Union Locale des Associations d'Anciens Combattants et Victimes de Guerre, le 2e régiment du Service Militaire Volontaire, et le Service jeunesse de Brétigny-sur-Orge. Ce projet a reçu le soutien du SDAT (Service du Développement et de l'Action Territoriale) au titre de «Culture et lien social».
En réanimant des scénarios inachevés ou des événements aux traces troubles, Angélique Buisson compose des conférences-performances, des films, des textes ou des installations comme des montages narratifs. L’archive et le document sont au cœur de ses interrogations, en particulier en ce qui concerne la traduction de l’histoire et ses mémoires fantômes, et la relation entre image et événement. Elle est titulaire d’un DNSEP de l’École nationale supérieure de Limoges, d’un Master 2 Édition-Livre d’artiste de l’Université de SaintÉtienne et du post-diplôme art contemporain et document à l’ÉESI—École européenne supérieure de l’image d’Angoulême.
Agenda
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30.10—03.11.2017
Atelier vidéo avec Angélique Buisson
Service Jeunesse de Brétigny-sur-Orge
Dans le cadre de sa résidence, Angélique Buisson propose un atelier pour les 12 à 17 ans avec le Service Jeunesse de la ville de Brétigny-sur-Orge. Une semaine durant, les participants pourront s'initier au pilotage de drones et prendre part activement au tournage et au montage d'un film. En manipulant des archives et en analysant différents objets, il s'agira de poser la question de l'impact des images sur notre perception des événements historiques et contemporains.